Par le Dr Cyrille Cazeau, chirurgien orthopédiste, spécialiste de la chirurgie du pied (www.chirurgie-du-pied.fr).

La chirurgie mini-invasive mixte

L’univers des techniques osseuses se partage en deux grands types de chirurgie qui s’opposent à la fois et se complètent : la chirurgie classique, dite « à ciel ouvert », et dernière née, la chirurgie percutanée.

N.B. : ce texte est parfois un peu technique ; les éléments en italique ne sont pas indispensables à la compréhension.

La chirurgie percutanée a t’elle une valeur ajoutée ?

Faut-il faire évoluer la première selon les idées du temps, c’est-à dire réduire l’action visible (les cicatrices) ? Oui car cela améliore les suites opératoires, diminue œdème et douleurs, permet plus de chirurgie ambulatoire, et confère une connotation moins agressive au geste, mieux supporté psychologiquement. Oui donc, mais à condition de ne pas faire de concessions sur la qualité des gestes.

Osteotomie de SCARFChirurgie mini invasive du pied

La chirurgie percutanée permet-elle de tout faire ?

La réponse est non. Certaines déformations ne peuvent être corrigées par une technique purement percutanée.

Chirurgie mixte mini-invasive :

La place va alors vraisemblablement s’ouvrir de façon naturelle pour une chirurgie mixte, mini-invasive. Cela fera d’ailleurs l’objet d’une cession aux prochains Entretiens de Bichat.

Il est intéressant de constater une évolution récente des idées, chez chacun, concernant les « jusqu’au boutistes » des camps opposés. D’une part, les promoteurs en France de l’ostéotomie à ciel ouvert restent fidèles à leur techniques, mais commencent à intégrer des gestes mini-invasifs ou percutanés dans leur procédures opératoires ; ils réduisent leurs incisions, réalisent des ténotomies percutanées, diminuent leurs ostéosynthèses, en passant de 2 à 1 vis… D’autre part, les partisans du percutané commencent à associer à leur pratique des ostéosynthèses percutanées, et sont bien obligés de réaliser des ostéotomies métatarsiennes classiques, en particulier quand le MT varus est supérieur à 16°. On est alors probablement en train de régler le curseur à un juste milieu, celui de la chirurgie mini-invasive. Par ailleurs, d’autres interventions placées plus haut sur le secteur jambier peuvent minimiser les gestes sur l’avant-pied, comme la libération des gastrocnémiens en cas de briéveté.

Les indications peuvent se résumer ainsi :

Chirurgie mini invasive du pied

Les gestes purement percutanés sont possibles :

  • pour la totalité des gestes sur les tendons et les enveloppes articulaires,
  • sur la réaxation du gros orteil (ostéotomie de varisation de l’hallux), la correction d’une déformation modérée du premier métatarsien (metatarsus varus),
  • la chirurgie des douleurs sous l’avant-pied (métatarsalgies) hors luxation, et des orteils en griffes.

Les gestes à ciel ouvert semblent indispensables :

  • pour le traitement du metatarsus varus de plus haut degré,
  • Lorsqu’il y a nécessité mécanique à abaisser la tête de l’articulation à la base du gros orteil (1° métatarso-phalangienne) ainsi que les lésions articulaires y siégeant,
  • les luxations des orteils (métatarso-phalangiennes des rayons longs).

Ces gestes à ciel ouvert peuvent cependant, par des artifices techniques, être réalisés par des incisions plus petites.

Conclusion :

Montrons ce cas. Il illustre un dossier de chirurgie mini-invasive, chez une patiente de 50 ans venant pour un hallux valgus, un métatarsus varus de plus de 16°, associé à des métatarsalgies intenses sous la tête de M2, avec une zone d’hyperkératose en regard, un 2° orteil en griffe. La longueur relative des métatarsiens est normale.

Des gestes à ciel ouvert : on lui a réalisé une ostéotomie de valgisation avec un effet d’abaissement du premier métatarsien de Scarf, ostéosynthèsée par 2 vis, cela à ciel ouvert.

Des gestes percutanés : les techniques percutanées ont permis de réaliser tous les autres gestes ; section de l’adducteur, ostéotomie de varisation de l’hallux, ostéotomies des cols de M2 M3 M4 avec recul harmonieux et effet de relèvement, traitement de la griffe par section isolée des parties molles.

Une chirurgie mixte mini-invasive donc, permettant à la fois de réduire considérablement les cicatrices, l’agressivité chirurgicale, tout en respectant le cahiers des charges mécanique indispensable à la réussite. (Notez en particulier la diminution après l’opération de la surface du cor plantaire, spontané, prouvant que la charge mécanique est mieux répartie)

Voici un autre cas : patient de 50 ans, diabète à l’insuline. Voie mini-invasivesur le 1° métatarsien, permettant une ostéotomie en chevron. Tout le reste, ostétomie de la phalange et section du tendon adducteur est réalisé en percutané. Noter que la section osseuse de la 1° phalange n’a pas été fixée par une vis, elle est tenue par une cale en silicone confectionnée au 8° jour post-opératoire, à conserver 21 jours. Il vaut mieux implanter le moins possible de matériel étranger chez les patients diabètiques pour minimiser les risques d’infection.

Chirurgie mini invasive du piedCas climique

Dr Cyrille Cazeau, chirurgien orthopédiste, spécialiste de la chirurgie du pied (www.chirurgie-du-pied.fr).